Le coût de la méconnaissance de l'entreprise par Lionel Tardy

Lionel Tardy, Chef d’entreprise et Député de Haute Savoie s’inquiète des conséquences graves de la méconnaissance de notre tissu d’entreprises familiales et des conditions de leur transmission.


 Jusqu’où va la méconnaissance des entreprises du gouvernement actuel? 


Le gouvernement et la majorité socialiste ne connaissent rien au monde de l’entreprise, et même au-delà de ce que l’on pouvait imaginer. Les différents projets de loi de Finances débattus en cette fin d’année en sont la preuve éclatante, avec une série de dispositions absolument catastrophique. Les exemples abondent, mais l’un d’entre eux m’apparaît exemplaire, tellement il est caricatural.


L’article 14 du projet de loi de finances rectificatif de décembre 2012 entend lutter contre ce que le gouvernement considère comme un abus, le dispositif de donation-cession. Quand une donation de titre est faite, elle permet aux donateurs de transmettre sans vendre, donc sans payer la taxe sur les plus-values. Elle permet aussi aux donataires de revendre les titres, sans avoir à payer de taxe sur la plus-value, puisque le prix de vente est proche du prix d’acquisition, qui est celui inscrit dans la donation. 

Pour le fisc, c’est visiblement intolérable. La loi a donc été modifiée, pour recalculer le prix d’acquisition en cas de revente par le donataire, moins de 18 mois avant la donation. La plus-value ne sera plus la différence entre le prix de vente et le prix inscrit dans la donation, mais celle entre le prix de vente, et le prix auquel le donateur les aura acquis…

Pouvez-vous prendre un exemple ? 

Si on prend l’exemple du chef d’entreprise qui a créé son entreprise, s’il fait donation des titres à ses enfants, et que ceux-ci veulent les revendre avant 18 mois, la plus-value atteint 100% de la valeur du titre… Comment vont faire les dirigeants d’entreprises familiales, quand ils ont plusieurs enfants, et que le principal actif est l’entreprise? Souvent, quand il y a un des enfants qui prend la suite, une donation est faite, avec une part égale pour chaque enfant, celui qui reprend l’entreprise rachetant immédiatement les parts de ses frères et sœurs. 

Avec ce nouveau dispositif fiscal, c’est terminé ! 

En cas de donation, les enfants qui reçoivent des parts de l’entreprise vont devoir attendre 18 mois pour vendre leurs parts, sinon, leur héritage sera quasiment confisqué. Ils ne toucheront leur argent qu’au bout de 18 mois, pendant lesquels ils auront à payer les droits de donation, car le fisc n’attendra pas 18 mois. Pendant cette même période, ceux qui n’auront pas de rôle dirigeant dans l’entreprise seront soumis à l’ISF, leurs parts n’étant pas considérées comme un patrimoine professionnel.

Quelles conséquences cela aura-t-il pour la transmission des entreprises familiales ? 

Pour mettre fin à un réel abus, on casse au passage le mécanisme juridique de transmission familiale des PME. Je vous laisse imaginer les problèmes de gouvernance des entreprises concernées, qui vont se retrouver considérablement fragilisées. 

Et dans quelques années, on constatera que les dirigeants des PME familiales, au moment de prendre leur retraite, préfèrent soit vendre, à des acheteurs qui seront souvent étrangers, soit recourir à des montages acrobatiques pour transmettre le fruit du travail d’une vie à leurs enfants. Je ne serais pas surpris qu’à ce moment là, si les socialistes sont encore au pouvoir, ils ne fustigent ces chefs d’entreprises, accusés soit de manquer de patriotisme économique, soit d’être des fraudeurs invétérés.