La jeunesse etait-elle vraiment la priorité de François Hollande? par Annie Genevard

La jeunesse était l'un des engagements-phare du candidat François Hollande. Presque 4 ans après, elle est dans la rue pour dire sa révolte et son désenchantement.

 

Une jeunesse désenchantée

 

Aujourd'hui, 2 millions de jeunes ne sont ni à l’école, ni au travail ni en formation. Ils paient le plus lourd tribut au chômage qui a progressé de 700 000 demandeurs en un peu plus de 3 ans. C'est un drame qui affecte le quotidien de très nombreuses familles alors même que le début de la vie professionnelle représente tant pour un jeune : l'émancipation matérielle, la concrétisation d'une formation, la réalisation de soi, la fondation d'une famille. De plus en plus de jeunes dépendent durablement de l'aide matérielle de leurs parents ou de leurs grands-parents, ce qui crée un sentiment d'insécurité généralisée et compromet l'estime de soi.

 

Ils sont les victimes de la politique erratique d'un président sans cap : à l'apprentissage qui est un puissant facteur d'insertion professionnelle comme on peut le voir en Allemagne qui a 4 fois plus d'apprentis que nous, on a préféré la voie sans lendemain, et pourtant connue comme telle, des emplois aidés. On vante l'alternance mais on complique les stages en entreprise. Combien d'appels désespérés reçoit-on comme parlementaires de la part de jeunes qui ne trouvent pas d'entreprise pour leur formation en alternance ! Ils sont en colère et on les comprend. Mais comment en faire grief à des entreprises dont beaucoup sont engagées dans un combat pour leur survie ou le maintien de leurs salariés. On prétend valoriser l'effort mais on veut supprimer les bourses au mérite. Il a fallu un recours devant le Conseil d’Etat pour faire reculer le gouvernement qui a rétabli les bourses mais les a diminuées de moitié. Je rappelle que celles-ci concernaient les étudiants méritants les plus modestes dont le gouvernement prétendait faire sa priorité. Que de mensonges!

 

Et que dire de l'absence quasi-totale dans le débat public de l'Enseignement supérieur et de la Recherche depuis le début du quinquennat ! Notre université est menacée de relégation. Non seulement elle attire peu de bons étudiants étrangers mais les jeunes Français sont de plus en plus nombreux à quitter la France pour leurs études et dans la foulée, pour leur emploi, mettant leur talent au service d'entreprises moins empêchées dans d'autres pays que dans le nôtre. Quel gâchis!

 

Une révolte qui se trompe d’objet

 

La présence massive de la jeunesse dans la rue est la traduction d'une juste révolte qui a malheureusement trouvé à s'exprimer à l'occasion de l'arrivée de la loi El Khomri. Faute d'avoir été annoncée dans le programme socialiste avant l'élection présidentielle, faute d'avoir été expliquée dans ses enjeux pourtant essentiels, bâtie à la hâte et portée par une ministre inexpérimentée que l'on plaint d'avoir été ainsi instrumentalisée dans le conflit entre le Premier ministre Manuel Valls et Emmanuel Macron, son ambitieux ministre de l'économie qui a inspiré le texte, cette loi est massivement rejetée par une jeunesse qui ne perçoit pas les dangers du statu quo et d'un code du travail qui corsète les relations sociales au sein de l'entreprise là où la confiance devrait prévaloir pour libérer l'emploi. L'emploi est devenu pour les responsables de PME une source de danger pour l'entreprise si celle-ci est confrontée au repli de son activité, à un accident de conjoncture ou à un problème relationnel. Comment, dans ces conditions, embaucher avec confiance? C'était le sens de cette loi que nous pourrions approuver si l'esprit initial demeurait et si l'on en retirait l'invraisemblable article autorisant les pratiques religieuses au sein de l'entreprise. Mais de reculade en renoncement, le gouvernement nous fait craindre le pire et le pire en l'espèce est de ne rien faire.

 

Les syndicats, les associations d'étudiants, les coordinations de lycéens se rassemblent, mus par des motifs différents pour que rien ne change alors que tout va si mal. Il n'y a là nul motif de se réjouir pour notre famille politique et pour nos entreprises. Pour protéger leurs prés carrés, les instigateurs des manifestations agitent toutes sortes de peurs et c'est l'immobilisme qui risque une fois encore de triompher. Il faudra de courageux engagements et des propositions claires dans le programme de notre famille politique pour de nécessaires changements.

 

Notre responsabilité politique est considérable. La révolte des jeunes dit aussi l'immense défiance qui s'est installée entre la jeunesse et l'ensemble de la classe politique. Elle s'approprie la rue, de nuit comme de jour, ce qui est un phénomène nouveau, rejoignant en cela les indignés d'autres pays. La rue, à défaut de l'emploi, dont ils voient s'éloigner les perspectives dans un contexte économique très incertain.