Faire des PME à forte valeur ajoutée un exemple de la reconquête industrielle française par Sophie Dion

Député de Haute-Savoie, Sophie Dion s’inquiète de l’impact de la politique économique du Gouvernement sur les TPE et PME à forte valeur ajoutée comme cela est le cas dans la vallée de l’Arve, aux pieds du Mont-Blanc, considérée comme la capitale mondiale de l’industrie du décolletage (fabrication de pièces de haute-précision).

 

 

 

L’activité économique de votre département résiste-t-il aux turbulences liées à la crise ?

Dans un contexte économique pour le moins difficile marqué par un net recul de l’activité industrielle, se soucier uniquement des entreprises connaissant les plus grandes difficultés apparaît comme une condition nécessaire mais pas suffisante. Il semble tout aussi utile de renforcer l’attractivité des filières qui résistent mieux que les autres à la tempête actuelle en raison de leur savoir-faire et des avantages concurrentiels qu’elles ont su développer au fil des ans au prix d’investissements en capital humain et matériel conséquents.

C’est le cas notamment des industries de la vallée de l’Arve, aux pieds du Mont-Blanc en Haute-Savoie, où s’est développé, en 300 ans d’histoire, unpôle spécialisé dans la mécanique de précision et la mécatronique.

De la naissance de l’activité horlogère à Cluses en 1720 à l’industrie actuelle, le développement y a été constant au point que ce pôle est considéré aujourd’hui comme la capitale mondiale du décolletage. Chaque année, ces entreprises transforment près de 250.000 tonnes de métaux (aciers, inox, laiton, alliages cuivreux, alliages spéciaux, métaux précieux..) en un grand nombre de pièces. De la fusée Ariane à la voiture de tous les jours, des satellites aux rasoirs électriques, du médico-chirurgical à l’aéronautique, de la Hi-Fi à l’industrie du luxe en passant par les téléphones mobiles… des milliers de produits contiennent des pièces décolletées ou mécaniques, des composants, issus des entreprises de la vallée.

Ainsi, la vallée de l’Arve concentre sur 30 kms de long plus de 800 entreprises de sous-traitance industrielle qui représentent plus de 55 000 emplois industriels et 20% du PIB national réalisé dans cette industrie. Un secteur dynamique en perpétuelle évolution qui, grâce à ses capacités d’adaptation et aux investissements dans la recherche, a su globalement mieux résister aux soubresauts de l’activité économique internationale et maintenir un niveau d’activité dont le rayonnement profite à l’ensemble de la Haute-Savoie et de la France. 

Quel constat faites-vous des mesures fiscales, économiques et sociales menées par le Gouvernement ?

Malgré les caractéristiques que je viens d’évoquer et sa capacité d’adaptation, le secteur subit néanmoins chaque jour un peu plus les effets négatifs des mesures économiques gouvernementales. Ces TPE et PME à forte valeur ajoutée ressentent, elles aussi, le poids d’un matraquage fiscal qui les fragilise depuis plus d’un an.

 

Et elles sont, elles aussi, victimes du double discours du gouvernement : d’un côté,  une version officielle qui se veut rassurante en soulignant l’importance du maintien d’une activité industrielle en France à grands renforts d’effets médiatiques menée principalement par le ministre du redressement productif Arnaud Montebourg. Mais, de l’autre, des charges de plus en plus lourdes qui pèsent sur les entreprises du secteur...

À l’été 2012, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a commencé par augmenter brutalement le forfait social en le faisant passer de 8 à 20%. Ainsi, en additionnant les mesures du premier budget rectificatif de 2012 de la nouvelle majorité (relèvement du forfait social -la fiscalité sur l’intéressement et la participation-, taxe sur les dividendes) aux mesures du budget 2013 et du financement de la Sécurité sociale, on atteint des hausses de prélèvements de 16 milliards sur les entreprises.

Or pour ces PME, comme pour beaucoup d’autres, ces hausses pèsent lourdement, notamment sur l’investissement. Un poste pour le moins crucial pour ces entreprises à taille humaine qui ont un besoin vital d’investir dans l’innovation technologique pour garantir leur compétitivité sur les marchés extérieurs alors qu’aujourd’hui elles doivent faire face à un coût du travail de plus en plus élevé en raison de l’augmentation constante du poids des charges sociales décidée par le gouvernement.

Le pôle de la vallée de l’Arve a bâti, sur une dynamique collaborative, un programme autour de 4 axes stratégiques : l’innovation, l’internationalisation, le financement et l’humain afin de faire émerger les leaders de l’industrie demain et conquérir les marchés d’avenir. Les entrepreneurs de la vallée ont toujours su intégrer les dernières avancées technologiques. Cette haute technicité garantit une production du plus haut niveau qualitatif. Aujourd’hui encore, pour faire face aux récentes évolutions de la sous-traitance et à la pression de leurs donneurs d’ordre, les industriels du décolletage font preuve d’une adaptabilité et d’un savoir-faire reconnus et appréciés. Ils s’affirment de plus en plus comme concepteurs en intégrant la fabrication de sous-ensembles et d’ensembles. Ils sont capables d’assurer une fonction à l’intérieur d’un système mécanique, électromécanique ou électronique.

Tous les outils sont ainsi réunis pour que les entreprises de la Vallée de l’Arve, non seulement maintiennent leurs positions, mais les améliorent en étant présentes dans le monde, en allant là où sont les marchés nouveaux. Comme le fait l’industrie allemande dans le domaine de l’équipement en machines, il est ainsi possible de garder la conception, d’augmenter les volumes en suivant les marchés, tout en gardant sur place les fabrications de haute qualité. Là sont les bases d’une vraie reconquête industrielle !

Tout cela risque aujourd’hui d’être remis en cause par la faute de décisions économiques qui vont à contre-sens des intérêts d’une de nos dernières filières industrielles dont les résultats sont pourtant largement positifs et résolument tournées vers l’avenir. Alors Mesdames et Messieurs du Gouvernement, merci de diminuer significativement les dépenses publiques, de baisser notamment les cotisations patronales et salariales et d’opter pour une flexisécurité plus opérantes. C’est à ce prix que nous resterons compétitifs et que nous continuerons à créer des emplois. Merci de vous ressaisir pour ne pas faire des TPE et PME à forte valeur ajoutée de la vallée de l’Arve, le symbole de l’échec de votre politique industrielle mais, au contraire, un exemple de notre indispensable reconquête industrielle.